Ceci, bien sûr, pose des questions importantes : pourquoi y a-t-il une vague soudaine de coups d’État militaires en Afrique de l’Ouest – les anciennes colonies françaises en particulier ? Pourquoi y a-t-il eu une recrudescence des sentiments anti-français dans la région ? Quel est le rôle de la CEDEAO et de la France dans ce casse-tête politique régional ?
Dans les rues bruyantes et carnavalesques de Ouagadougou, Niamey, Bamako, Conakry, une seule phrase a été scandée avec constance et passion en symphonie par une foule gigantesque de manifestants : « A bas La France » ; signifiant, littéralement : « à bas la France ».
Malgré l’octroi de l’indépendance à ses anciennes colonies africaines à travers la vague de décolonisation africaine dans les années 60, la France maintient jusqu’à présent une emprise néocoloniale sur ses anciennes colonies africaines – exploitant systématiquement leurs ressources minérales par une ingérence politique ouverte – créant des régimes fantoches dans la région et laissant les habitants du territoire dans une pauvreté infortunée au milieu d’une pléthore de richesses minérales naturelles ; un paradoxe dévastateur.
Le cas du Burkina Faso est illustratif : en 1987, le charismatique président militaire du Burkina Faso, Thomas Sankara qui, tout au long de son bref règne s’est engagé dans des programmes décoloniaux, a été froidement abattu par des crétins militaires sous les ordres de Blaise Compaoré qui en est immédiatement devenu le chef. d’État et a gouverné avec un fer d’abord avec l’approbation française de la France pendant 27 ans jusqu’à ce qu’il soit chassé du pouvoir par des manifestations de masse en 2014. Depuis lors, la trajectoire politique du Burkina Faso a été un spectacle amusant et dévastateur à voir ; à l’instar d’autres pays francophones, le Burkina Faso est devenu le théâtre de luttes politiques. Il en va de même pour le Cameroun, où la France soutient actuellement un octogénaire qui gouverne par contumace depuis 1982, écrasant horriblement les oppositions et trahissant la quasi-totalité des principes démocratiques.
Il en est de même au Gabon. Cela a immédiatement mis en évidence l’incohérence de la politique étrangère des Français en particulier, et de l’Occident en général. L’Occident ne déteste pas les prises de contrôle militaires, il déteste seulement « les prises de contrôle militaires qui défient leurs intérêts économiques ». En un mot : les régimes militaires et autres gouvernements illégitimes sont jugés acceptables dans la mesure où les intérêts économiques français sont protégés. En fait, les intérêts économiques occidentaux l’emportent sur les idéaux démocratiques.
Il en va de même au Niger, où des bases militaires françaises sont dispersées à travers le pays, apparemment pour aider à combattre les fondamentalistes islamiques militants dans la région, avec peu ou pas de progrès réalisés. L’aggravation des conditions matérielles des Nigériens alors qu’ils habitent le pays qui abrite l’un des plus grands gisements d’uranium au monde, responsable d’éclairer 40% de la France alors qu’ils sont continuellement plongés dans l’obscurité, a poussé le peuple nigérien à descendre dans la rue pour exiger une réévaluation médico-légale de leurs relations économiques avec la France tout en exigeant le retrait complet des troupes françaises de leur pays ; ils traitent le président renversé Mohammed Bazoum de marionnette française.
Ces mêmes perturbations se font écho dans d’autres anciennes colonies françaises du Sahel. Se pourrait-il que la France, bien qu’elle ait approuvé des régimes militaires dans le passé et des gouvernements inconstitutionnels actuellement, ait renforcé la démocratie en raison de son impopularité et de la montée imminente de l’influence de la Russie au Sahel ? L’impopularité continue de la France dans la région du Sahel et la pertinence politique imminente de la Russie dans la région ont provoqué un appel à l’action de l’UE par le biais de la CEDEAO.
En effet, la France se soucie moins du système politique pratiqué au Niger ni des conditions matérielles des Nigériens que de la réaffirmation de son influence politique en luttant avec la Russie. Le Sahel est une projection directe de plus de cent ans de politique étrangère française ; il reflète l’influence néocoloniale dominante de la France. Le Sahel est en un mot, un théâtre de lutte contre la domination impériale française.
CEDEAO : les fantassins de l’impérialisme au Sahel
La CEDEAO et l’UE infantilisent politiquement le peuple nigérien en menaçant d’une action militaire comme panacée pour rétablir l’ordre constitutionnel dans la petite république. Cependant, les engagements démocratiques français sont fallacieux car ils n’ont qu’une valeur extrinsèque ; ces engagements manquent de substance car la France ne cherche pas à « restaurer la démocratie » au Niger mais tente de se réaffirmer comme une puissance impériale engagée à canaliser les ressources collectives du peuple à travers des régimes fantoches utilisant la CEDEAO comme fantassins à cette fin sans scrupules.
Comme le disait Frantz Fanon, « chaque génération doit sortir d’une relative obscurité, découvrir sa mission, la remplir ou la trahir ». Les dirigeants africains de la CEDEAO ont devant eux une obligation historique ; ils ont le devoir de ne pas laisser leur continent dégénérer en un théâtre de guerres par procuration.
La République du Niger est une nation souveraine indépendante avec ses problèmes intérieurs ; par conséquent, la CEDEAO doit s’abstenir de trahir les principes fondamentaux de la démocratie en occupant un État souverain dans sa tentative de « restaurer la démocratie ». Les chefs d’État de la CEDEAO doivent agir comme un seul et cesser d’agir comme des chiens d’attaque au coup de sifflet de l’UE.
Cet article a été initialement publié sur tehrantimes.com